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Au sommaire des actualités :

 

Mardi 5 mars 2002
L'article qui suit montre, malheureusement, combien il n'était pas nécessaire d'être devin, augure, ou spécialiste en géopolitique internationale, pour avoir su, au lendemain des attentats du 11 septembre, que cette horreur serait l'opportunité et, de facto, le prétexte invoqué par les Etats Unis pour réaliser leur rêve d'Etat total en tentant d'imposer par tous les moyens et sur tous les fronts, économiques, idéologiques et militaires, le système inique de la mondialisation libérale.

L'axe du Mal

Trois fronts. Les citoyens doivent savoir que la mondialisation libérale attaque désormais les sociétés sur trois fronts. Central parce qu'il concerne l'humanité dans son ensemble, le premier front est celui de l'économie. Il demeure placer sous la conduite de ce qu'il faut vraiment appeler l' " axe du Mal " (1), constitué par le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale et l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Cet axe maléfique continue d'imposer au monde la dictature du marché, la prééminence du secteur privé, le culte du profit, et de provoquer, dans l'ensemble de la planète, de terrifiants dégâts : hyperfaillite frauduleuse d'Enron, crise monétaire en Turquie, effondrement calamiteux de l'Argentine, dévastations écologiques partout…
Et la prochaine Conférence internationale sur le financement du développement, qui se tient à Monterey (Mexique) du 18 au 22 mars, risque d'aggraver le désastre général en affirmant que le secteur privé doit devenir le principal acteur du développement du Sud (2). Il est scandaleux que les chefs d'Etat et de gouvernement, en particulier ceux de l'Union européenne, refusent d'adopter, en faveur du développement, les indispensables mesures qui, seules, peuvent sauver de la misère les deux tiers de l'humanité. On peut en retenir dix :
- annuler totalement la dette des pays pauvres ;
- mettre en place un système de règlement généreux, juste et équitable de la dette des pays du Sud ;
- définir des garanties pour que les futurs financements soient engagés dans des conditions satisfaisantes et utilisés en faveur d'un développement durable ;
- obtenir des pays riches qu'ils s'engagent à consacrer au moins 0,7 % de leur richesse au financement du développement ;
- rééquilibrer les termes de l'échange entre le Nord et le Sud ;
- garantir la souveraineté alimentaire dans chaque pays ;
- contrôler les mouvements irrationnels de capitaux ;
- interdire le secret bancaire ;
- déclarer hors la loi les paradis fiscaux ;
- et mettre en place, enfin, une taxation internationale des transactions financières.

Le deuxième front, clandestin, silencieux, invisible, est celui de l'idéologie. Avec la collaboration active
d'université, de prestigieux instituts de recherche (Heritage Foundation, American Enterprise Institute, Cato Institute), de grands médias (CNN, Financial Times, The Wall Street Journal, The Economist, imités en France et ailleurs par une foule de journalistes asservis), une véritable industrie de la persuasion a été mise en place afin de convaincre la planète que la mondialisation libérale apporterait enfin le bonheur universel. En s'appuyant sur le pouvoir de l'information, des idéologues ont ainsi construit, avec la passive complicité des dominés, ce qu'on pourrait appeler un délicieux despotisme (3).
Cette manipulation a été relancée après le 11 septembre, avec la création par le Pentagone d'un très orwellien Bureau d'influence stratégique (BIS), chargé de diffuser de fausses informations pour " influencer les opinions publiques et les dirigeants politiques aussi bien dans les pays amis que dans les Etats ennemis (4) ". Comme dans les années les plus sombres du maccarthysme et de la guerre froide, une sorte de ministère de la désinformation et de la propagande a donc été mis sur pied chargé d'établir, comme dans les dictatures ubuesques, la vérité officielle. La ficelle était si grosse que le Bureau en question a dû être officiellement fermé, fin février.

Le troisième front, inexistant jusqu'à présent, est militaire. Il a été ouvert au lendemain du traumatisme du 11 septembre 2001, et vise a doter la mondialisation libérale d'un appareil de sécurité en bonne et due forme. Un moment tentés de confier cette mission à l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN), les Etats-Unis ont décidé d'assumer seuls cette mission et de se doter de moyens considérables pour l'exercer avec la plus impressionnante efficacité. La récente guerre en Afghanistan contre le régime des Talibans et contre le réseau Al-Qaida a convaincu Washington qu'il est inutile, pour des missions de cette envergure, de demander une collaboration militaire autre que minimale à ses principaux alliés stratégiques, Royaume-Uni et France, ou même à l'OTAN (5).
Cette attitude de mépris a été confirmée lors de l'annonce récente, faite sans consultation de ses alliés,
de l'intention de Washington d'attaquer prochainement l'Irak. Les protestations des chancelleries européennes, qui s'estompent déjà, n'ont nullement impressionné l'administration américaine. La fonction des vassaux est de s'incliner, et l'Amérique aspire désormais à exercer une domination politique absolue. " Les Etats-Unis sont en quelque sorte le premier Etat proto-mondial, constate William Pfaff. Ils ont la capacité de prendre la tête d'une version moderne de l'empire universel, un empire spontané dont les membres se soumettent volontairement à son autorité(6). "

Cet empire aspire à réaliser dans les faits la mondialisation libérale. Tous les opposants, tous les dissidents et tous les résistants doivent maintenant savoir qu'ils seront combattus sur ces trois fronts : économique, idéologique et militaire. Et que le temps du respect des droits humains semble révolu, comme le prouve l'établissement de ce scandaleux " bagne tropical " à Guantanamo où plusieurs Européens sont séquestrés dans des cages… L'axe du Mal (FMI, Banque mondiale, OMC) dissimulait son vrai visage.
On le connaît à présent.
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(1) Dans son discours sur l'état de l'Union du 29 janvier 2002, le président des Etats-Unis, M. Georges W. Bush, a évoqué un " axe du Mal " constitué, selon lui, par l'Irak, l'Iran et la Corée du Nord.
(2) Lire : " Projet de conclusions et décisions de la Conférence internationale sur le financement du développement ", Nations unies, assemblée générale, 30 janvier 2002, document A/AC.257/L.13.
(3) Lire Propagandes silencieuses, Galilée, Paris 2000.
(4) International Herald Tribune, 20 février 2002.
(5) Lire Guerres du XXI siècle, Galilée, en librairie le 14 mars 2002.
(6) International Herald Tribune, 7 janvier 2002.

Ignacio RAMONET, Le Monde diplomatique, N° 576 - mars 2002

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Du terrorisme

En France, comme dans tous les pays dits riches, personne, maintenant plus que jamais, ne peut éluder ou, plus justement, ne devrait éluder sa part de responsabilité dans les attentats qui ont frappé les U.S.A. Le terrorisme est un mal dont les racines pénètrent et s'insinuent en chacun de nous.
Certes, il est très difficile, surtout pour nous, occidentaux, de se départir de son propre mode de vie : celui d'une sur-consommation évidente, souvent même, ressentie comme un dû ; mais, comment ne pas voir les implications et répercussions mondiales de notre "richesse", comment continuer à feindre d'ignorer qu'elle est une provocation permanente à la face de plus des trois-quarts de l'humanité, qu'elle est le fond sur lequel grandissent toutes les frustrations, tous les ressentiments, sur lequel s'enracinent toutes les haines.
Depuis le 11 septembre notre responsabilité se change en culpabilité si nous refusons la lucidité critique en nous posant en victimes.
Nous ne pouvons pas accepter le large consensus béat, diffusé à l'envi, qui se contente de dénoncer, de condamner, et de faire mine de chercher des coupables - alors qu'ils sont tout désignés ; "coupables", donc, sur lesquels nous pourrons, à grande force et à bon compte, nous décharger de notre responsabilité ; cette dénégation collective (et non pas seulement celle des U.S.A.), si elle fût toujours l'expression du mépris des "grands États" à l'égard des pays "pauvres", n'est plus tenable aujourd'hui - sauf par ceux, cyniques et calculateurs, dont le seul but est la conservation de leur hégémonie, pratiquant "de droit" ce qu'il faut bien appeler un "terrorisme d'État".

Les artistes vraiment, plus que quiconque encore, parce qu'ils oeuvrent dans "l'éternel présent", ont à charge de dénoncer le piège des mots, des images, des évidences, des formules toutes faites, que nous entendons et voyons à longueur de journée, censés nous renseigner sur cet événement-catastrophe. Car il s'agit bien d'un événement, d'un fait auquel vient d'aboutir notre situation internationale. Interrogeons-nous sur la généalogie de ce mal, qui remonte bien avant la colonisation, dont le terrorisme est l'expression paroxysmale la plus manifeste, la plus violente sans doute, mais aussi, la plus désespérée.
Je vous invite à réfléchir avec moi au texte de J.M. Domenach qui suit.
Ecrit dans les années 70, ce texte est criant d'actualité ; la fin même préfigure ce que nous vivons ces jours-ci.

Tout a été dit, tout a été écrit, mais rien jamais n'est compris.
Alors, un petit effort.

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"Le "terrorisme", c'est d'abord la guerre des autres. Le mot a été consacré par le vocabulaire de la propagande : Terroristen, ainsi les nazis avaient-ils baptisé les franc-tireurs ; Terror-Angriff (attaques de terreur) désignait les bombardements alliés sur les villes allemandes. A l'époque, nous avions pourtant la conviction que la véritable terreur était le fait d'une entreprise totalitaire de domination et d'asservissement plutôt que d'actes isolés - si terrifiants fussent-ils - commis au service de la libération des peuples opprimés. De même, les commandos sionistes, il y a vingt-cinq ans, étaient "terroristes" aux yeux des Anglais : de même, aujourd'hui, aux yeux des Israéliens, les commandos palestiniens… Il est donc nécessaire de se méfier d'un mot, lui-même "piégé", et se rappeler que les actes violents sont moins graves que les États violents, même s'ils sont plus spectaculaires. Une personne qui meurt dans la rue émeut davantage que cent personnes qui meurent chez elles.
De grands États, puissants et respectés, qui ont des sièges aux instances internationales, font, sous une forme plus ou moins dissimulée, peser la terreur sur de larges partie de leur population. Mais, lorsque des groupes dépourvus d'État (Irlande du Nord, Palestiniens, Noirs américains, etc.) en usent d'une manière qui ne peut être que sporadique et plus ou moins incontrôlée, l'opinion publique est bouleversée, et les condamnations pleuvent. A y bien regarder, c'est un paradoxe, car l'usage de la terreur par un État constitué, reconnu et donc capable de se faire obéir, est beaucoup plus répréhensible que s'il s'agit de groupes irréguliers, plus ou moins clandestins, et par-là exposés aux risques d'anarchie et de surenchère qui guettent toutes les résistances. Certes, il est normal que des États bénéficient de privilèges interdits à des groupes particuliers. Mais la terreur est proscrite par le droit des gens. Les États qui la condamnent lorsqu'elle s'exerce à leurs dépens sont souvent mal fondés à en appeler à un droit international qu'ils ne se font pas faute de bafouer (ainsi Israël, qui n'a jamais tenu compte des multiples condamnations et recommandations de l'O.N.U.). C'est pourquoi, si l'on ne se résigne pas à la généralisation du terrorisme, qui conduirait à une sorte de jungle sans arbitrage, il faut en appeler à des arguments politiques et moraux ajustés à la pratique du terrorisme lui-même.
Faut-il tenir le langage de l'efficacité ? "Contrairement à l'illusion dangereuse, de plus en plus répandue dans notre société (…) les moyens les plus violents ne sont pas les plus efficaces". Disons plutôt : ne sont pas toujours les plus efficaces, car il arrive qu'ils le soient : le premier terrorisme du F.L.N. a conduit à l'indépendance de l'Algérie, et certains détournements d'avions ont déjà arraché à des dictatures plusieurs centaines de détenus politiques ou d'individus persécutés.
Cependant, si réussies que puissent être de telles actions, elles portent en elles de graves contradictions. Par le système des otages, elles se trouvent en appeler à l'humanité de ceux dont elles dénoncent les pratiques inhumaines. Menées au nom des masses, elles sont exécutées par de petits groupes qui se substituent aux organisations responsables et qui, pour ainsi dire, volent le peuple de son action libératrice et suscitent souvent chez lui, au lieu d'une conscience combative, la gêne et même le dégoût. Menées pour un but politique, elles empruntent leurs méthodes aux criminels de droit commun. Avec raison, les marxistes se méfient de ces actions anarchiques, toujours au bord de dégénérer en meurtres irresponsables et inutiles, de ces terroristes fascinés et en quelque sorte damnés par la violence. Malraux a dessiné il y a longtemps l'inoubliable portrait.
Il faut donc modérer et encadrer le plus possible le terrorisme (la résistance française était arrivée empiriquement à cette conclusion). Lié à une cause et à un peuple par une organisation responsable, limité dans ses objectifs, le terrorisme peut être l'avant-garde, l'appel d'une juste cause. Promu au rang d'activité prioritaire, il tend à se refermer sur lui-même, à déposséder ses auteurs de leurs justifications et ses partisans de leur responsabilité et de leur vigueur. J'ajoute que l'apologie du terrorisme faite par ceux qui n'en prennent pas les risques est toujours ignoble.
Ces considérations éthiques et politiques ne touchent cependant pas le fond, c'est-à-dire la situation malsaine et ordinairement dissimulée, que révèle la prolifération actuelle du terrorisme. N'oublions pas que la paix mondiale résulte de "l'équilibre de la terreur", même si elle permet un essor inouï de l'industrie et du commerce. On reproche aux terroristes de tuer des non-combattants, mais qu'est-ce que la dissuasion atomique, sinon une permanente menace de mort signifiée à des millions de civils ? Or c'est précisément cet équilibre de la terreur, maintenant cimenté par la diplomatie et l'économie, qui autorise les deux plus grandes puissances à bloquer des évolutions qui, de plus en plus, explosent en terrorismes. Un gigantesque mécanisme, trop lourd pour être secoué et trop complexe pour être révisé, assure la tranquillité du désordre établi. Nous le voyons également fonctionner à l'échelle réduite à l'intérieur des États, où il produit des résultats analogues : le recours à des actes de rupture qui revêtent parfois des formes terroristes.
Allons plus loin. On s'indigne de ce que les terroristes - particulièrement les pirates de l'air - s'en prennent à des "innocents". Or il n'y a plus d'innocents en temps de guerre. Y en a-t-il en temps de paix ? Et de quoi sont donc coupables les enfants qui meurent de faim dans certains pays sous-développés ? Bénéficiaires d'un système qui fonde sur la menace permanente du massacre atomique et sur l'exploitation des pauvres son empire et sa prospérité, nous pouvons difficilement prétendre n'en être pas complices. Il est trop commode, lorsque ce système est agressé, de se réfugier dans la dénonciation vertueuse, et les Israéliens ont raison lorsqu'ils constatent que cette indignation est à la mesure de la peur qu'inflige le terrorisme à des nations qui, jusqu'alors, ne se croyaient pas concernées. Oui, un jour ou l'autre, n'importe lequel d'entre nous peut devenir un otage.
L'esprit du temps travaille à diluer la culpabilité individuelle. Personne ne se veut responsable de rien. Mais alors naît une culpabilité collective bien difficile à cerner, comme on le voit à propos des accidents de la route. Peut-être la diffusion du terrorisme aura-t-elle l'avantage de nous conduire à un examen de conscience sur notre responsabilité solidaire en politique. Ensuite - car il ne faut pas s'arrêter longtemps à l'accusation - nous devrions considérer que le terrorisme dénonce le blocage généralisé des sociétés et des institutions, nationales et internationales. L'hypertrophie technique, comme le montre Jacques Berque, se paye de l'immobilisation et de la réduction des autres facteurs du développement humain. Il faut donc s'employer à diversifier et à assouplir les institutions, de sorte qu'elles puissent traduire les évolutions de la base et se plier à la revendication de ces différences qu'exacerbe la civilisation technique.
Si, demain, chacun peut devenir une cible pour les tenants d'une cause qu'il méprise ou qu'il ignore, c'est le signe que nul n'échappe désormais à sa responsabilité à l'égard de l'ordre qui meurt et de celui qu'il est urgent de créer. Le terrorisme, n'est pas un résidu de barbarie qu'on puisse évacuer à force de discours vertueux et de mesures policières, mais le symptôme d'un détraquement et d'une injustice essentielle, l'annonce de terreurs et de morts plus absurdes, qu'il reste en notre pouvoir d'éviter."

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Ainsi, le fait de réserver le terme de "terrorisme" aux seules actions ennemies et en particulier aux actions isolées, cache mal l'existence de certaines situations de terreur permanente ; cette habitude, dans les discours dominants, est largement univoque et lourde de présupposés, de non-dits.
Tous les États écoutés et reconnus instaurent des régimes bien plus coupables que les actions ponctuelles de ces groupes irréguliers qu'ils condamnent pourtant avec indignation.
C'est la situation mondiale actuelle, fondée sur une dissuasion atomique commode et sur le modèle économique dit libéral, inégalitaire et criminel, qui est bien autrement plus menaçante et explosive ; c'est elle qui provoque ces fréquentes et inévitables irruptions de violence.
Si au moins le terrorisme permettait de secouer le conservatisme socio-politique des Nations ; s'il pouvait les contraindre au déblocage, ce qui s'est passé ne serait plus un "é-vainement" mais un véritable avènement : l'arrivée, le commencement d'un nouvel avenir.

S'il reste quelque perspective, cette menace générale, nous accusant tous, semble agir pour le moment comme un révélateur, elle nous signale nos erreurs passées et présentes et nous invite, en nous gardant de celles qui nous guettent, à préserver l'avenir. Mais je crains que nous nous bercions toujours d'illusions : hier encore, était programmé à la télévision "Rambo". Et, combien d'audimat ?
Il faut souligner, avant tout, que nul n'est innocent dans cette prétendue paix, et le terrorisme, que nous dénonçons surtout parce que nous le voyons, parce qu'il est démonstratif et monstrueux, parce qu'il nous fait peur, parce que nous le savons aveugle, pouvant frapper n'importe où n'importe qui, est particulièrement apte à révéler notre hypocrisie collective, dès lors que l'individualisme égoïste n'est plus roi.
Devant le terrorisme le "chacun pour soi parce que moi d'abord" ne tient plus.
Que signifie d'affirmer qu'il n'y a pas d'innocence individuelle ?
Que notre compromission est totale parce que consentie par chacun de nous. Nous savons tous pour l'avoir entendu, lu, que le problème est sans solution, car bien peu de personnes de nos pays "riches" sont réellement prêtes à partager, à limiter leur consommation, à aliéner une grande part de "leurs" libertés au profit de l'ensemble des autres hommes. Toute réforme est perçue comme une régression, alors que de se délester de certains "besoins" sociaux, comme la bagnole entre autres, serait un signe de haute culture.
"Les données du problème sont désormais bien connues, et pas seulement des experts : tout le monde sait que les ressources mondiales s'épuisent tandis que la démographie explose, que l'Occident pompe les richesses de la planète comme un cancer, et que les choses ne pourront pas longtemps continuer ainsi. Le problème, c'est que la société occidentale ne peut pas se réformer (ce qui est mis en œuvre sous ce nom est absolument dérisoire et ne modifie en rien la tendance générale), et que les mécanismes qu'elle a mis en place semblent rendre toute révolution impossible. Tout se passe comme s'il n'y avait plus qu'à attendre la catastrophe. La société occidentale est incapable de se réformer parce que paradoxalement elle est étroitement liée aux intérêts de ses membres - qu'elle exploite pourtant - sous la forme du bien-être matériel et de la sacro-sainte "liberté", auxquels les individus ne sont pas disposés à renoncer." Christian Carle.

Pour conclure momentanément, à bien y réfléchir, je pense, au risque de passer pour un alarmiste inconscient, un provocateur sans cœur, que la catastrophe du 11 septembre n'est rien en comparaison des crimes que nous perpétrons tous les jours, au nom de la logique économique et commerciale, avec la bonne conscience de ceux qui font leur travail, dans le silence et l'anonymat des tours de verre. Cette catastrophe, sans la minimiser, doit être replacée dans le contexte des impasses économiques actuelles : elle est le signe déclaré que la violence endémique et larvaire, que connaît la planète, est passée à son stade manifeste ; que la relance économique de l'Occident passe, comme toujours, par la guerre et ne se fera que dans la guerre. Selon quelles modalités ? Guerre "propre", éradication bactériologique, attaques nucléaires, qui sait. Une chose est certaine : il y aura d'innombrables "innocents" qui mourront ; une autre chose est quasi-certaine : ce que l'homme invente c'est toujours, tôt ou tard, dans le but de s'en servir.
Cette catastrophe, horreur s'il en est, même si elle a le mérite, aujourd'hui, d'étendre la réflexion des hommes bien plus que d'ordinaire sur les risques de la mondialisation, de mobiliser les consciences apeurées sur le sort de la planète, sera très vite utilisée comme "L'opportunité", pour l'Occident, d'encore mieux asseoir son hégémonie, d'imposer son modèle à la face d'un monde définitivement défiguré.
La logique du profit c'est aussi de rendre profitable l'horreur.

Combien j'aimerais me tromper !
Marc d'Aenthéos